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mercredi 17 novembre 2010

Les hauts bois de Sylvida, conte fantasmagorique ...

Je suis allé en forêt avec le cadet de mes enfants ramasser de belles écorces pour agrémenter quelques fougères au jardin ... C'est alors que tout a commencé ...


Il était une fois un jeune enfant se promenant en forêt.  Plus qu'une simple marche, il voulait découvrir le coeur de la forêt ... Serait-ce une clairière, la plus haute futaie, le plus vieil arbre, le plus bel endroit ?
Mais comment trouver cet endroit ? L'enfant avait préparé cette expédition en interrogeant ses aïeux mais personne ne connaissait cet emplacement, tous étonnés par cette question.
- " Pouqué don min infant joues tu point à la marelle, té vas te perdre dans ces hauts bois ... "
- " Mais non, Mère Grand, vous ne comprenez pas ... " répondit gentiment l'enfant.
- " Et qué don ?  "

L'enfant n'entendit pas cette question. Il avait déjà filé chez le luthier demander à son fils de bien vouloir lui prêter un hautbois.
- " Un hautbois ? Tu ne joues plus de piano ? " demanda-t-il en tendant l'instrument.
- " Si, si, mais je t'expliquerai demain,  je vais jouer des gammes en forêt ... "
Était-ce un mensonge ? Non, une intuition dirigeait ses pas ...

Il se rendit ensuite chez le vieux bûcheron du village, un homme à l'apparence rustre, maugréant sans cesse, haut comme une armoire, que dis-je, deux armoires ! Notre enfant surmonta vraiment sa peur car cet homme était craint, tant il faisait peur. Il était surnommé, attention promettez-moi de ne pas lui répéter, c'était L'Ogre, voilà. Toujours dans les bois, solitaire, dormant plusieurs mois dans sa cabane ... Ne fréquentant pas les vogues du village, il était resté célibataire ... Une jeune fille aurait-elle voulu au moins danser avec lui ?
Par chance, le bûcheron était de retour,  la neige commençant à blanchir les sapinières après avoir recouvert les alpages. Toc,toc, toc ...  La lourde porte de chêne s'ouvrit avec un grincement effroyable  mais d'une force comme si un ouragan s'engouffrait dans la masure ! Surpris de voir un enfant qui semblait haut comme trois pommes, il s'abaissa et demanda la raison de ce dérangement.
- " Oh, Monsieur, quelle chance avez- vous de vivre en forêt, c'est fantastique la beauté de l'automne et puis vous devez parler avec les animaux, vous connaissez le nom de tous les arbres, celui de chaque champignon par coeur ? "
Ce flot de parole abasourdit notre homme qui en fait avait tendre coeur. Comment en effet, pourrait-on vivre au contact de la nature, l'aimer, sans être attentif à son prochain ? 
- " Oui, Petit, la forêt est ma vie."
- " Connaissez vous le coeur de la  forêt ? "
- " Le coeur de la forêt ? Que veux tu dire ? "
- " Oui, j'aimerai voir le coeur de la forêt, j'ai visité un jours une grotte, mon grand-père m'avait dit que c'était le coeur de la montagne ... "
Le bûcheron réfléchit avant de répondre, soucieux de ne pas décevoir la sincérité de cet enfant, comment lui dire que la forêt est immense, plusieurs semaines de marches étant nécessaire pour atteindre la toundra ... 
- " Que tiens-tu dans cet étui, Petit ? Un hautbois ! Mais c'est extraordinaire ... Il te guidera, tu joueras et les notes te conduiront au travers des arbres. Le coeur est dans les hauts bois, tu le  découvriras, j'en suis certain."
- " Comment vais-je le reconnaître ? "
- " Tu auras une conviction dans ton coeur, ce sera l'endroit qui te parlera. Tu en auras la certitude."
- " Oh, merci, Monsieur!"
L'enfant s'en alla.
- " Attends Petit, mets cela quand même dans ton sac, tu me rendras la boussole et me raconteras ton voyage dès ton retour ! "
Le bûcheron, regarda s'éloigner l'enfant sur le chemin de la forêt, le coeur ému, submergé par les souvenirs de son enfance, quant il avait voulu découvrir en forêt, l'endroit où naissaient les faons ...


Poursuivant sa route, notre enfant rencontra une dame vêtue de noir, le visage émacié sous un fichu de laine usé et rapiécé, une branche d'arbre pour canne.
- " Où vas tu seul ? Dans le bois ? Ne connais-tu pas les sylphides ? Elles vont te tuer, j'en ai vu une, terrible ... "
- " Les quoi, les sylphides ? "
- " Oui, les arbres ont une âme, une conscience ... Cette conscience est appelée sylphide.
La sylphide est un esprit qui vis à l'intérieur de l'arbre, elle sort parfois sous l'apparence d'un elfe car sinon elle est très laide; on dit même que les arbres maléfiques comme le houx ont des sylphides si agressives qu'elles peuvent tuer un homme avec leurs griffes, alors un enfant, vite rentre chez toi ! "
- " Non, non, euh, j'ai rendez vous, j'ai une boussole, un plan, pas de problème ... Rentrez vite chez vous Madame, vous semblez avoir une fièvre ... "
- " Ah oui, à mon âge, je suis fatiguée d'avoir couru les bois; tiens, je vois que tu aimes la forêt, je te donne ça, c'est pour toi. "
Elle sorti une vieille bourse de sa besace, l'ouvrit. Un corbeau s'envola, mais l'enfant ne pu avoir la certitude qu'il partit de ce sac.
- " Étrange ." se dit-il alors que la dame lui tendait une médaille en or.
- " Oh merci, Madame, comme elle est belle, comme elle brille, c'est vrai qu'elle est pour moi ? "
Elle regarda les yeux de l'enfant briller de joie tandis que les siens pleuraient, se rappelant, il y a bien longtemps, quand un inconnu lui avait offert cette médaille, alors qu'elle voulait découvrir la clairière où les animaux élisaient leur roi après avoir lu que le cerf, par ses hauts bois, était le roi de la forêt ...


Rangeant la médaille, l'enfant sortit son hautbois et se mit à jouer. Ses doigts se plaçaient instinctivement comme si il avait joué  toute sa tendre enfance. Enchanté, il prenait plaisir à jouer, ce n'était que trilles légères ...
Il arrêtait, écoutant le chant des oiseaux lui répondre, reprenait de plus belle sans s'apercevoir que la voie devenait venelle, le chemin cheminée, le sentier sente, le passage ponceau ... Pour quelle raison dites-moi ? Envoûté par la musique, comment aurait-il vu que les branches s'écartaient devenant portées musicales, les épines se faisaient velours, à mesure qu'il suivait les notes au travers des arbres !


Pris dans sa rêverie, emporté par la musique, soudainement il crut voir l'ocelle de la plume d'un paon , puis les yeux d'un hibou !


Notre enfant était émerveillé par cette coïncidence, cette bûche prenant forme, prenant vie. ..


Après avoir regardé autour de lui si le fameux coeur de la forêt était enfin visible, il baissa de nouveau les yeux vers cette bûche ... Stupeur, que voit-il, le visage de la dame en noir !

Sylvida

Elle portait une somptueuse parure d'or, son unique chicot brillait comme une perle, enchâssée par un rouge à lèvres quelque peu sanglant ...

- " Me voilà à présent atteint de fièvre à mon tour ... " pensa t-il.

Il repris sa quête, siffla de plus belle pour vaincre sa peur. La forêt devenait enchanteresse, mystérieuse, étrange, inquiétante car dans la pénombre d'une sombre sommière il découvrit des squelettes de dinosaures, longs, très longs, aux os usés, rongés par les loups, tourmentés par l'attente  de cette rencontre depuis des millions de millénaires.


squelettes de dinosaure des bois

Les pas de l'enfant se faisaient lent alors que les idées courraient dans sa tête. Quel étrange endroit, serait-ce le coeur de la forêt, son berceau existant depuis la préhistoire ?

S'agenouillant sur la mousse pour caresser ces dinausores, toucher le bois fossilisé éparpillé, humer l'humus, il remarqua alors une foule nombreuse l'entourant, des animaux aux pieds, aux jambes immenses ! Il eu peur, mais non, ce n'était que les troncs d'arbres ...

Il se décida, simplement pour ce changer les idées, à regarder attentivement la médaille. La  tenant à hauteur de son visage, il vit face à lui, une main ouverte, une main protégeant un coeur que le reflet de la médaille lui avait fait découvrir ...


Main crochue présentant le coeur de la forêt
(simple feuille de mûrier rouge sang !)

Le coeur de la forêt n'était pas le plus bel endroit, ressemblant au contraire à un ossuaire !
Du bois mort surgissait la vie ... L'enfant venait de comprendre le cycle de la nature depuis l'origine du temps mais il comprenait aussi le présent et discernait au travers des arbres le futur encore obscur ... Ce coeur qui battait encore, alors que la forêt mourrait, exploitée par le profit des papetiers, le gaspillage des bureaucrates et non plus soignée, entretenue avec soin,  par amour comme le faisait le bûcheron du village qu'il se dépêcha de rejoindre la nuit tombant ...




Le coeur de la forêt battait de même dans celui de la vieille dame aux vaines superstitions, la sève de la forêt coulait dans les veines de Sylvida ... Le coeur de cet enfant battra toute sa vie pour la forêt qu'il défendra avec amour et militantisme ... Le coeur de la  forêt continuera toujours d'inspirer mes rêves ...  Et pour vous, que représente  ce coeur, que fera-t-il ?

A ma Loulou qui a décoré Sylvida et rêvé avec moi. Lui faisant remarquer que nous étions un peu fou de faire cela, perdus au coeur de la forêt, elle me répondit - " Non Papa, créatifs ".

9 commentaires:

  1. Effectivement... créatifs !! Tes enfants ne doivent pas s'ennuyer avec un sens de l'imagination si développé !! Je vous souhaite de Beaux Rêves

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  2. On mettrait bien notre main dans la tienne quand tu pars en forêt. Merci pour ce joli conte.

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  3. Le coeur de la forêt, celui que l'on entend battre entre les hautes futaies, si impressionnant, pouvait bien inspirer un si beau conte ! Loulou semble avoir les pieds sur terre - certainement parce que tu lui permets de rêver !
    Merci - j'ai rêvé aussi !

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  4. quel joli conte... merci de nous avoir emmenés avec Loulou et toi, à la recherche du coeur de ta forêt. Et sans doute, lors de mes prochaines ballades dans nos belles forêts comtoises, j'essaierai moi aussi d'aller à sa recherche...

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  5. Joli conte et belles images qui nous invitent à rêver !
    Bisous

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  6. Bien joli conte, Adiante.
    J'observe sur ton blog le ciel du Léman, tout aussi flamboyant que celui de Nice !

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  7. Je n'ai pas autant d'imagination mais je pense que je regarderai la forêt différemment maintenant. Et avoir un enfant ou un petit enfant à qui raconter doit aider....

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  8. Quel merveilleux conteur tu es, Adiante, je me suis laissé complétement enchanter par cette histoire, la forêt est une grande inspiratrice. Merci pour ce moment magique :)

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  9. Un bien joli conte Adiante, je suis bien partis dans ton voyage, merci :)

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Bavardage ou rêve, assis sur le vieux banc du jardin ...

Je réponds aux commentaires le plus souvent sur le blog même de l'intéressé(e) ... Sachez que j'apprécie chaque bavardage, chaque conseil.

Hélas le temps ne me permet pas toujours d'apporter une réponse, Veuillez m'en pardonner !